Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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mardi 28 juin 2016

L'Avocat du diable - Guilty as Sin, Sidney Lumet (1993)

Une brillante avocate troublée par le charme d'un gigolo manipulateur accusé de meurtre, décide de le défendre malgré les preuves évidentes de sa culpabilité.

Guilty as sin est un Lumet très mineur mais pas désagréable, porté par le scénario d’un Larry Cohen toujours habile à tisser des pitch de thrillers roublards. Lumet y explore un environnement récurrent de sa filmographie, la cour d’un tribunal. Ces lieux et leurs alcôves sont pour le réalisateur vecteur de dilemmes moraux captivants dans des œuvres comme Douze hommes en colère (1957), Le Prince de New York (1981), Le Verdict (1982), Dans l’Ombre de Manhattan (1997) et de comédie humaine hilarante dans le plus tardif Jugez-moi coupable (2006). L’Avocat du diable est bien loin de la richesse thématique de ces films mais fait également du tribunal le cadre d’un affrontement intéressant. La brillante avocate Jennifer Haines (Rebecca De Mornay) y règne en maître, imposant son charme, bagout et autorité comme le montre la scène d’ouverture où elle fait acquitter un homme d’affaire véreux. Les plans d’ensemble de l’héroïne arpentant et dominant la cour, la silhouette séduisante ainsi que l’assurance déterminée qu’elle dégage affirment par l’image son charisme. Il en va de même dans sa vie privée avec une scène sensuelle la montrant après son procès se montrer une amante aussi entreprenante qu’elle ne l’est lors de ses plaidoiries. C’est une femme accomplie dont le vernis va progressivement se fissurer avec la rencontre de David Greenhill (Don Johnson).

Jennifer y voit un défi de plus avec ce gigolo accusé du meurtre de sa femme, mais ce client pas comme les autres va au contraire révéler sa fragilité. Don Johnson déploie dans un premier une bonhomie sympathique avec ce personne d’ineffable séducteur prenant tout à la légère. Cette désinvolture est pourtant un masque dissimulant une volonté de domination sur la gent féminine de pouvoir. Cela semble d’abord purement pécuniaire et motif de comédie avec les richissimes bienfaitrices qu’il soumet à sa volonté (notamment pour payer sa note d’avocat) mais on comprend que ce besoin de domination va plus loin. Il voit en Jennifer une adversaire plus coriace que ces victimes habituelles et va se faire un plaisir de la briser psychologiquement. 

Larry Cohen multiplie les situations ambigües plaçant l’avocate en porte à faux par le seul jeu manipulateur de Greenhill, et Don Johnson est diablement inquiétant avec cet éclat de folie dans le regard sous le brushing et les costumes impeccables. Sidney Lumet traduit ce rapport de force par une mise en scène subtile où Rebecca De Mornay semble de plus en plus écrasée par l’aura maléfique de Don Johnson. Le jeu de séduction initial la place immédiatement en situation de faiblesse alors qu’elle pense dominer. Le premier coup de folie de Don Johnson montre la silhouette de l’acteur en amorce au premier plan, surplombant Rebecca De Mornay pour la première interloquée par l’étrangeté de son client. Plus tard le réalisateur rallongera et rétrécira à sa guise des environnements vastes comme la salle de réunion du cabinet d’avocat où se rencontre les deux personnages. La distance puis le rapprochement, le jeu sur la profondeur de champs et la bascule sur les plans américains se font au gré du dialogue où Don Johnson déstabilise Rebecca De Mornay, faisant d’elle sa proie en finissant la scène tout proche d’elle dans une fausse posture d’amant et une vraie attitude de fauve.

Tout cela reste très intéressant tant que l’on reste dans le duel psychologique et les faux-semblants. Malheureusement quand vient l’heure des révélations le film tombe dans tous les clichés possibles du thriller du samedi soir. Les rebondissements grossiers s’enchaînent, emmenés par un Don Johnson omniscient et démoniaque qui perd grandement de son intérêt. L’argument féministe se perd complètement aussi, Rebecca De Mornay ne renversant pas la tendance en mettant à son tour à profit son intelligence pour se montrer l’égal de son adversaire. A la place on aura une bagarre ridicule qui conclut l’ensemble dans la précipitation brouillonne. C’est bien dommage, d’autant qu’en cette même année Rebecca De Mornay incarnera (dans un registre plus négatif certes) un personnage sacrément retors et charismatique dans le thriller La Main sur le berceau

Sorti en dvd zone 2 français Hollywood Pictures 

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