Dévoreur de pellicule monomaniaque, ce blog servira à commenter pour ceux que cela intéresse tout mes visionnages de classiques, coup de coeur et curiosités. Je vais tenter le défi de la chronique journalière histoire de justifier le titre du blog donc chaque jour nouveau film et nouveau topo plus ou moins long selon l'inspiration. Bonne lecture et plein de découvertes j'espère! Vous pouvez me contacter à justinkwedi@gmail.com, sur twitter et instagram

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vendredi 6 janvier 2012

Waterloo Road - Sidney Gilliat (1945)



Une jeune femme, délaissée par son mari parti pour la guerre, se console dans les bras d'un mauvais garçon. Averti, le mari s'échappe et poursuit les amants dans les rues de Londres.

Joli film croisant mélo et comédie et qui sur fond de triangle amoureux classique offre une vision assez juste du quotidien des anglais sous le Blitz. Tillie Colter (Joy Shelton) est une jeune mariée qui n'a guère eu le temps de gouter aux joies du bonheur conjugal puisque son époux Jim (John Mills) fut mobilisé peu après les noces. Esseulée elle se sent désormais étouffée entre la bienveillance pressante de sa belle-mère et la surveillance permanente de sa belle-soeur qui la soupçonne d'adultère. Ainsi oppressée et malheureuse, Tillie est finalement malgré elle toute disposée à céder aux avances du fourbe séducteur Ted Purvis (Stewart Granger) mais averti le mari fuit sans permission pour connaître le fin mot de l'histoire.
 
Avec pareil pitch on s'attend forcément à du gros vaudeville et si le film joue parfois dessus le propos s'avère bien plus intéressant. Sidney Gilliat avait déjà abordé le thème des conséquences de la guerre sur une famille anglaise dans son précédent Millions Like Us (déjà avec Joy Shelton) et poursuit sa réflexion ici à l'échelle d'un couple. On découvre ainsi comment l'irruption du conflit a brisé l'élan des jeunes gens, les faisant abandonner leur responsabilités avant qu'ils se montrnt digne de les assumer et de grandir.

Gilliat exprime sobrement cette idée à travers un court flashback sur le dernier moment heureux du couple, le jour de leur mariage, et leurs timidités et manières empruntées témoignent de leur candeur et d'une complicité qui ne demande qu'à s'installer mais ils n’en auront pas le temps. Le script rend étonnement peu coupable l'adultère potentiel de Joy Shelton (cela va même plutôt loin pour la tatillonne censure anglaise) et justifie ses motifs par le caractère effacé de John Mills. Ce dernier n'a rempli aucun de ses "devoirs conjugaux" en laissant sa femme sans foyer (qui vit donc chez sa belle-famille où elle se sent épiée) ni enfant, ce dernier point soulevant une interrogation sur sa virilité et donc puissance sexuelle puisque symboliquement lorsque tout sera résolu l'épilogue montrera désormais la présence d'un nourrisson au sein du couple.

A l'opposé le coureur de jupon incarné par Stewart Granger déborde de masculinité, autant par son physique imposant (face à la frêle carrure de John Mills) que par ses attitudes désinvoltes envers les femmes. Un aspect bien appuyé par la caractérisation du personnage, ancien boxeur qui se plaît à claquer les fesses de ses futures conquêtes. Face à cette toute puissance virile, Joy Shelton ne peut/veut pas résister et pour la reconquérir, John Mills devra lui prouver qu'il est désormais un homme, un vrai.

Hormis des inutiles prologues et épilogues nostalgiques avec le personnage de médecin joué par Alastair Sim, l'histoire fonctionne en unité de temps et de lieu dans ce quartier ferroviaire de Waterloo Road. Le rythme se fait trépidant et riche en péripéties où John Mills sillonne le quartier tout en étant traqué par l'armée pour retrouver son épouse avant qu'elle ne commette l'irréparable. On a quelques moments et rencontres amusantes comme ce soldat canadien en fuite également qui va occasionner des courses poursuites communes trépidantes avec notre héros mais sous la légèreté, les hurlements des sirènes, le grondement des bombes et les destructions inattendues d'édifices nous ramènent constamment aux temps difficiles que l'on vit alors.

La résolution se fera bien évidemment par une empoignade brutale entre les deux rivaux, filmée avec énergie par Gilliat qui y amène une émotion inattendue. Ainsi John Mills (excellent comme toujours) sévèrement malmené trouvera les ressources pour se relever par un échange de regard avec sa femme inquiète, aimante et enfin admirative de son homme venu l'arracher des bras d'un autre. Stewart Granger demeure étonnement sympathique malgré la goujaterie de son personnage et on est finalement fort admiratif du trio d'acteur qui dote d'une belle humanité ces héros imparfait et attachant. Vraiment un excellent et riche film bouclé en 1h15 à peine. Cela donne envie de découvrir d'autres films de Sidney Gilliat.

Disponible en dvd zone 2 anglais dans le coffret Stewart Granger sous-titrée anglais et pour le film seul une édition anglaise existe également mais sans sous-titres.

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